LA BAJON !
…
C’est ma découverte de la semaine, probablement celle du mois, peut-être même celle de l’année. Elle a eu l’intelligence d’arriver bêtement, à un moment où je ne m’y attendais pas. Je faisais la planche sur internet, autrement dit je surfais mollement, sans but précis, quand je suis tombée sur son sketch intitulé “Trésor Public”. Et là, pif paf, bim boum. Le coup de foudre, le coup de bluff, le coup de maître. Je me suis mise à crawler sur ma planche de surf internautique et j’ai cherché d’où avait bien pu émerger ce zébulon féminin du manège désenchanté qui nous sert de scène comique aujourd’hui. Car il faut bien dire que depuis la disparition des géants Coluche, Le Luron, Desproges, Devos, et mis à part quelques belles singularités du calibre de Stéphane Guillon et Florence Foresti, la relève tarde à se manifester…
La Bajon semble relever le défi. J’ai donc consulté quelques rares articles sur le phénomène et j’ai appris que les planches avaient démangé la brunette très tôt. Les planches de la scène, évidemment, pas les planches à voile. Une ligue d’improvisation à peine sortie de l’adolescence, trois ans de cours Simon et puis des années de castings galères en tant que jeune comédienne qu’on ne rappelait jamais… ça commençait plutôt mal. Le spectre de la trentaine désabusée menaçait. Lassée des projets qui n’aboutissaient pas et des comédiens qui ne brulaient pas (les planches) du même feu, elle s’est lancée dans le one woman show. « Au moins, si ça ne marche pas, ce ne sera qu’à cause de moi ! » pensa-t-elle. Il a fallu ramer mais sa planche de salut est enfin arrivée par le truchement de sketches postés sur le web. Les partages et le bouche à oreille ont fait gonfler la vague. Elle est en passe de se muer en déferlante, le nombre de vues cumulées dépassant les 50 millions. De quoi éveiller l’intérêt des producteurs. Exit les salles confidentielles de la scène parisienne. Aujourd’hui, La Bajon se donne en spectacle au Grand Point Virgule de Montparnasse et les tournées en province se multiplient.
…
…
Ses clips internet, qu’elle produit à un rythme effréné, continuent d’enflammer la toile. Ses complices attitrés composent un casting réussi, notamment Lisa Raduszynski (la boulangère) et Clément Parmentier (l’URSAFF). L’écriture des scenarios est l’œuvre du duo La Bajon (qui rêve en écoutant les Beatles) et Vincent Leroy (le reporter). Ce sont les Lennon/McCartney des ce Magical Hysteric Tour. Il y a un style, une patte humoristique et des messages empreints d’une impertinence particulière, parfois poétique, voire surréaliste. Outre des ressorts comiques de qualité, ces vidéos souvent tournées et montées à l’arrache s’appuient sur des textes remarquables. Certaines répliques sont des modèles du genre. Dans Trésor Public, à la question du journaliste qui s’étonne que la boulangère ne se rebelle pas devant les prélèvements exagérés qu’on lui impose, une réponse cinglante fait mouche : « Non… Ne vous inquiétez pas. Les gens, on leur laisse juste assez pour qu’ils aient peur de le perdre » ! La Bajon n’a pas peur de dire les choses qui font réfléchir. Cette petite nana ne redoute pas de s’attaquer aux plus grands. Souvent, en guise de conclusion, elle convoque une sorte de justice immanente, une petite morale à sa fable moderne. On aimerait tant que cette corrélation entre les mauvaises actions et les sanctions frappant leurs auteurs se vérifie dans la réalité…
Ultime curiosité dans ma quête d’informations : l’origine de ce nom, La Bajon ? Ma première inclinaison, et le type plutôt méditerranéen de l’intéressée, me le faisait prononcer à l’espagnole. La jota aidant, La Bajon devenait alors la baronne. Fausse piste. La Bajon se prononce à la française, phonétiquement plus proche de l’abat-jour que du titre de noblesse ci-devant énoncé. La raison en est toute simple. Bajon est le nom de famille des parents adoptifs de la comédienne. Ses copines de lycée l’appelaient déjà la Bajon. Pourquoi en changer dans la cour de récréation des adultes ?
…
Bonjour,
Tout ce que tu dis est totalement vrai. elle tourne en dérision nos décideurs et elle a un authentique talent qui éclaire le paysage humoristique. Il y a pas mal de temps que je l’ai repérée sur la toile et je trouve ses sketches plus que réussis. Un excellent mimétisme avec les gens qu’elle caricature. Des mises en scène au cordeau et un bel éclat de rire pour entretenir le tout. Une artiste que j’ai de plus en plus envie d’aller découvrir sur scène. À Paris ou ailleurs puisque je pense qu’elle va monter en puissance. Ii n’y a pas, heureusement, que du mauvais sur la toile. Cela permet à des personnes de talent de passer outre les différents écueils pour arriver à s’imposer au public. Alors, Chapeau l’artiste !!
Oui, heureusement que de temps à autres, quelques découvertes de ce calibre viennent égayer le paysage artistique français…
Dans un registre un peu similaire quoique différent, et toujours féminin, Nicole Ferroni distille des chroniques très orientées dans un style bien personnel et superbe. Très forte, la fille. Enfin, moi, j’aime beaucoup. On peut les assimiler à des coups directs dans la g….. !!