UNE FLÈCHE EN PLEIN CŒUR
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Il faisait partie de ceux dont le nom est moins connu que l’une de leurs créations. Alan Merrill, né le 19 février 1951 dans le Bronx, à New York, est décédé ce dimanche 29 mars 2020 des suites du coronavirus, à l’âge de 69 ans. Son père saxophoniste et sa mère chanteuse de jazz lui avaient sans doute transmis des gènes plutôt remuants. Placé dans un collège en Suisse de 9 à 13 ans, il revint à New York pour écumer les clubs de Manhattan avec des velléités de chanteur guitariste adolescent ! Quelques groupes rock plus tard, il s’envola pour le Japon, où sa personnalité et sa gueule d’ange de la pop firent un tabac. La fin des années 1960 l’y propulsa sur la vague du succès. Conscients de son impact sur un public jeune, producteurs, télévisions et publicistes se l’arrachèrent sans ménagement. L’emballement de la machine médiatico-markéting ressemblant de plus en plus à un carcan dont l’artiste ne parvenait à desserrer l’étreinte, une seule issue paraissait s’imposer : la fuite.
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En 1974, Alan Merrill décida d’émigrer à Londres, où il forma le groupe “The Arrows” (Les Flèches), en compagnie du batteur Paul Varley et du guitariste Jake Hooker. Alan y assurait la partition à la basse et le lead vocal. Le succès ne tarda pas à être de nouveau au rendez-vous, notamment auprès d’un public très jeune. Managers et producteurs de tous poils flairent le bon filon et n’eurent qu’une idée en tête : orienter le groupe dans un schéma commercial “band pour ados”. Ce même schéma réducteur qu’Alan Merrill avait voulu fuir en quittant le Japon. Avec son compère Jake Hooker, il composa alors un titre rebelle : “I Love Rock’n Roll” ! À sa sortie, en 1975, la chanson fut d’abord reléguée en face B du 45 tours “Broken Down Heart”. Devenu aujourd’hui un standard incontournable du rock, elle a définitivement acquis un statut de numéro un dans toutes les mémoires. Elle en a même éclipsé ses créateurs. The Arrows ont surfé sur leur succès anglais jusqu’à la fin des seventies puis Alan Merrill a repris ses valises pour un retour à New York en 1980. Ironie du sort, deux ans plus tard, le passé le rattrapa à nouveau, et de quelle manière ! La reprise magistrale, dès 1982, du fameux “I Love Rock’n Roll” par Joan Jett & the Blackhearts, acheva de porter le morceau au firmament du rock, sans que le grand public n’en connaisse véritablement l’origine.
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Les dernières décennies virent Alan Merrill s’épanouir dans un registre à la fois plus tranquille et plus rock. Celui qui n’a jamais vraiment couru après la gloire (il semble même, par moments, avoir tout fait pour la laisser derrière lui), a définitivement posé ses valises. Il a rejoint ses deux complices du groupe Arrows, décédés assez jeunes également (le batteur Paul Varley en juillet 2008, à 59 ans, et le guitariste Jake Hooker en août 2014, à 61 ans).
Hier, sa fille Laura déclarait : « Le coronavirus a pris mon père ce matin. On m’a donné deux minutes pour lui faire mes adieux avant d’être pressée de sortir. Il semblait si paisible et quand je suis partie, j’avais encore une lueur d’espoir qu’il ne finisse pas sur un bandeau d’informations de CNN ou de la Fox. J’ai marché cinquante pâtés de maisons jusqu’à chez moi, toujours l’espoir dans mon cœur… Quand j’ai franchi les portes de mon appartement, j’ai appris qu’il était parti ». Peu de temps après, sur Twitter, Joan Jett lui a rendu un dernier hommage : « Je me souviens encore regarder The Arrows à la télé à Londres, et être époustouflée par cette chanson qui résonnait en moi. C’est avec une profonde gratitude et beaucoup de tristesse que je lui souhaite un beau voyage de l’autre côté ». Où qu’il chemine, l’éternel jeune voyageur a du apprécier.