HAPPY 97 !!!
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Pour la jeune génération, ce vieux monsieur est un inconnu. Tout juste a-t-elle déjà entendu prononcer son nom au détour d’une émission pour cinéphiles. De la fin des années 1960 jusqu’à la fin des années 1990, il a pourtant été un immense réalisateur, acteur, producteur et scénariste américain. Certains affirment même qu’il a créé un style et un courant particulier. Mel Brooks souffle aujourd’hui ses 97 bougies avec la décontraction et le sourire qui restent attachés à une vie et à une œuvre qui en ont influencé beaucoup d’autres.
Issu d’une famille juive germano-russe, Melvin Kaminsky voit le jour à New-York le 28 juin 1926. Très tôt, il est attiré par la comédie et la musique. À 13 ans, il apprend à jouer de la batterie avec le jazzman Buddy Rich. Il s’implique aussi dans le théâtre mais, à la fin de ses études universitaires, il doit faire un détour par l’armée de terre lors de la seconde guerre mondiale. Le comédien-imitateur et musicien-batteur est alors en Europe pour servir dans le génie. Évidemment, il en profite pour monter des spectacles burlesques afin d’amuser les autres soldats. À son retour, sous le pseudonyme de Mel Brooks, il se produit dans des cabarets, des hôtels, des stations touristiques. Il acquiert rapidement une réputation d’animateur et humoriste professionnel, dans un style typique de la stand-up comedy. En 1949, il est repéré par Sid Caesar, l’un des pionniers de la télévision américaine, considéré comme le plus grand comédien à sketches. Les deux hommes travaillent ensemble durant une dizaine d’années. Mel Brooks a déjà franchi un cap mais cela ne lui suffit pas. En 1963, il s’immisce dans le cinéma en tant que scénariste et narrateur d’un court-métrage intitulé “The Critic”. Cette satire des films d’avant-garde décroche un oscar. Il bifurque ensuite dans la production télévisée et crée, avec Buck Henry, la sitcom télévisée “Max la Menace” (1965-1970), truculente parodie des films d’espionnage à la James Bond. Durant toute cette période, il est également producteur de théâtre et auteur de livrets à Broadway, mais c’est en tant que réalisateur de cinéma qu’il va connaître la consécration et la renommée internationale.
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En 1968, il réalise “The Producers”, qui remporte l’oscar du meilleur scénario original. Après “Le Mystère des Douze Chaises” et “Le Shérif est en Prison”, il signe, en 1974, un chef d”œuvre hilarant : “Frankenstein Junior”. Ce film, dont il a écrit le scénario avec son complice Gene Wilder, est encensé par la critique et le grand public. Les deux extraits présentés ci-dessus donnent un bon aperçu de cette parodie des films d’horreur des années 1930. Tourné entièrement en noir et blanc, une rareté plutôt risquée dans les années 1970, émaillé d’ambiances cotonneuses, de fondus au noir entre les scènes et de musiques typiques du genre, ce long métrage représente un pari plus que téméraire. Il est relevé haut la main et propulse sur le devant de la scène des personnalités aussi différentes que Gene Wilder, le personnage principal, Marty Feldman, au regard venu d’ailleurs, Peter Boyle (le monstre), et même un certain Gene Hackman, dans le rôle du vieil ermite aveugle… Pour bon nombre de spectateurs qui l’ont vu dès sa sortie en salle, ce film constitue une délicieuse surprise et une véritable révélation : celle d’un style et d’un talent caractéristique. Mel Brooks impose un humour à la fois débridé et codé, en équilibre entre les références et les décalages. Il redore le blason du pastiche cinématographique en dosant l’excès à la perfection. Il fait la part belle à l’absurde et à l’auto-dérision. Il baguenaude entre grandes questions existentielles et petites préoccupations nombrilistes. Comme le dit à un moment Young Frankenstein : « Vous savez ce qui se passera si je meurs ? Et bien, mon livre de recettes sera perdu à jamais ! ».
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Parmi les films incontournables réalisés par Mel Brooks, il faut aussi citer “La Dernière Folie de Mel Brooks” et “La Folle Histoire du Monde”, comédie burlesque qui caricature l’histoire depuis l’Âge de pierre à la Révolution française. Il poursuit un temps dans la même veine parodique, mais le lascar a la bougeotte. La casquette de producteur lui fait de l’œil. Il crée sa société de production Brooksfilms et ajoute à son palmarès “Le Grand Frisson” en 1977 (dédié à Alfred Hitchcock, qui lui envoya une bouteille d’un grand Bordeaux accompagné de ce message : « Un simple échantillon du plaisir que j’ai pris, n’ayez surtout pas d’anxiété à ce sujet. »), “Elephant Man”, en 1980, et “La Mouche”, en 1986. Difficile de faire mieux. Après les années 1990, Mel Brooks prend peu à peu ses distances avec le monde du cinéma. Marié à Anne Bancroft en 1964 (l’actrice qui incarna Mrs Robinson dans “Le Lauréat”, face à un jeune débutant nommé Dustin Hoffman), il lui reste fidèle jusqu’à sa mort en 2005. Dans le monde du septième art, il demeure une personnalité à part, touche à tout de génie, imperturbablement optimiste et fantaisiste. Il fait partie du cercle très fermé des artistes ayant réussi le grand chelem en matière de récompenses cinématographiques : Emmy Awards, Grammy Awards, Oscars et Tony Awards.
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En 2021, l’infatigable Mel Brooks s’est remis à l’écriture d’une deuxième partie de la ”La Folle Histoire du Monde”, dans une version en huit épisodes commandée par la plateforme Hulu. « Je suis impatient de dire encore une fois la vérité sur toutes les histoires bidons que tout le monde a crues en pensant que c’était de l’Histoire ! » a confié le maître du cinéma comique hollywoodien. Cette précision résonne étrangement juste dans le contexte troublé du moment. Il aurait pu ajouter une autre de ses réflexions politiquement incorrectes : « Si les présidents ne peuvent pas le faire à leurs femmes, ils le font à leurs pays ». Avec ce dernier projet en date, il boucle peut-être une boucle entre cinéma et musique. En effet, cette “Folle Histoire du Monde” avait accouché, en 1981, d’une chanson intitulée “It’s good to be the king” (C’est bon d’être le roi), qui avait fait un carton dans les charts dance et R&B. Elle avait même été samplée et reprise ultérieurement par des rappeurs. Dans le clip éponyme, Mel Brooks apparaissait déguisé en Louis XVI (voir vidéo ci-dessous). Quelle sera sa prochaine extravagance ? La réponse se cache peut-être au sein de ce petit florilège de citations, très représentatif du personnage :
« Personne ne devrait jamais s’excuser d’avoir de grands rêves. »
« Tout ce que nous sommes est le résultat de ce que nous avons pensé. »
« J’ai été accusé de vulgarité. Je dis que c’est des conneries. »
« La tragédie est ce qui m’arrive. La comédie est ce qui vous arrive. »
« Si Einstein et Shaw n’ont pu vaincre la mort, quelle chance ai-je ? Pratiquement aucune. »
« L’humour n’est qu’un des moyens de se défendre contre l’univers. »
« Je ne sais pas quoi dire, alors je vais juste dire ce que j’ai sur le cœur : badoum, badoum, badoum… »
À 97 ans, ce palpitant sensible et malicieux semble encore s’exprimer parfaitement.
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